Personnal Manager, la fonction à peine cachée du Community
Manager ?
Des prairies sauvages du web émergent une à une, en une
profusion grandissante, les inflorescences d’une « nouvelle » espèce
autoproclamée : Community Manager. Mais à y regarder avec l’œil du
botaniste en quête de nouveaux taxons, il se révèle bien des nuances
spécifiques… avec une dominante pour
celle qui, en réalité, n’est qu’une mutation volontaire du Personnal Manager. Apparaissant
déguisé sous la forme de Community Manager, lui-même copie à peine modernisée d’une
très ancienne profession, celle de grand-mère, le Personnal Manager est en
réalité un terrible parasite égocentré « qui vit aux dépens de celui qui l’écoute ».
Merci Jean de La Fontaine (1621 – 1695), toi qui connaissait fort bien ces renards
là, déjà.
Le propre du Personnal Manager est d’abord de crier haut et
fort qu’il est Community Manager. Usant sans modération de cet anglicisme ridicule,
un de plus, pour désigner des choses simples et ordinaires, entre personnes
parfaitement françaises, par exemple (excuse est faite pour ceux qui échangent
effectivement uniquement en anglais, bien sûr). Community manager... Vanity manager ??? Se vendre et se vanter, parler de lui et
encore de lui en laissant modestement trois lignes aux propos de deux ou trois parasités,
voilà le vrai savoir faire du Personnal Manager. Quand aux parasités, par leur talent, ils fourniront
sans le savoir, un talent à l’endoparasite, qui en est le plus souvent
dépourvu, et par là-même une légitimité.
Pas sûr donc, au final, que celui ou celle qui se place en « Gestionnaire
de communauté » ou « animateur de groupe » ne soit pas plus
intelligent et efficace que ceux ou celles qui vantent leurs talents de
Community Manager.
Je l’ai déjà dit à bien des reprises, ma grand-mère fut la
meilleure Community Manager qui soit. Et pour cause : elle était au
service de la communauté, SA communauté, toujours prête à valoriser untel,
consoler un autre, insuffler de l’énergie à unetelle et donner la leçon à une
autre ; toujours prête à créer les meilleurs moments ensemble, à
introduire malicieusement d’autres gens dans NOS cercles, à nous faire profiter
mutuellement des expériences de chacun et des richesses de tous. Ma grand-mère
savait bien, pour ne pas l’avoir appris (mais ressenti), que le Tout pouvait,
devait, être supérieur à la somme des Parties, et qu’en ce sens, chacun en
tirerait avantage. Synergie et grandeur, voilà ce qu’elle savait faire de sa
famille, et de celles des autres qu’elle côtoyait et nous faisait découvrir.
Personne de côté, des petites attentions aux uns et aux autres, à tous. Nous
étions tous riches d’elle. (Eh oh… les Personnal-Community Manager ! yen a
t-il beaucoup qui peuvent prouver que les éléments de leur communauté sont
riches d’eux ?)
Personne de côté ? enfin elle mise à part. En véritable
Community Manager elle oubliait de penser à elle, trop concentrée sur le bien
de la communauté. Et finalement, elle en a tiré d’immenses plaisirs. Elle se
faisait plaisir en faisant plaisir aux autres, ou pas plaisir parfois quand
nous nous égarions ! La communauté… voilà ce qu’elle voyait , un cercle
sans frontière, capable d’extension, qui devait être un tout, et dont chacun,
constitutif pour partie, pouvait tirer grandeur de cette grandeur.
Ce qui lui importait avant tout c’était de faire vivre et
dynamiser sa communauté. Jamais elle ne perdait son temps à faire cocorico de
sa mission, jamais elle ne se plaignait de la difficulté de sa mission. Cette
mission là, elle l’avait choisit. Elle ne lui donnait pas de nom, c’est
nous qui lui donnions. Alors pardonnes moi, grand-mère, de te traiter de « Community
Manager », tu était bien plus intelligente que cela. Ni anglophobe, ni
xénophobe, tu aurais pourtant détesté être affublée de ce genre de
qualificatif.
Votre grand-mère... les sentiments en plus !
Un jour, tu as décidé que ta mission était remplie avec la
certitude de celle qui a autre chose à faire que de dire « je m’en vais.. »,
« ah ben non, finalement je reviens… » ; tu as fini tes jours à
regarder vivre le fruit de ton œuvre. Mais à nos yeux, grand-mère, tu étais LA
plus grande. Pas un instant tu ne fus gestionnaire de la communauté au service
de TA personne. (Eh oh… les Community Manager ! y en a t-il beaucoup qui
peuvent prouver qu’ils ne sont pas des Personnal Manager déguisés en Community
manager ?).
Grand-mère, je voudrais crier, à la face du monde, que tu
es, comme tes grands-parents, et les grands-parents de tes grands-parents l’inventrice
de la gestion de communauté. Mais tu n’aurais pas aimé que l’on te congratule,
que l’on t’implore de rester, que l’on s’extasie devant tes talents, que l’on
parle de toi, et de toi, ou encore de toi. Alors je n’écris que ces mots, pour rappeler
aux Personnal-Community Manager qu’être Gestionnaire de Communauté ne consiste
pas à crier quelques anglicismes et à se faire valoir sur l’ensemble de l’improbable
planète des médias sociaux. Il faut un peu plus de modestie, d’abnégation même,
d’amour des autres, pour prétendre à
cette fonction.
Attention… la planète virtuelle se cogne parfois encore au
réel. Et là, ça fait mal. Le virtuel démasqué prend forme, prend chair, et
devient « ridiculisable ».
Mais comme nous savons qu’aux côtés des Personnal Manager il
existe cette nouvelle profession de Community Manager, créée par les
entreprises pour leur propre image, et que la définition de Community Manager
prends alors un autre sens hélas bien éloigné, nous semble-t-il, de la notion de gestionnaire de communauté, nous
renvoyons le lecteur vers ce lien qui donne quelques explications pertinentes à ce
sujet.
Tweetons, Facebookons, LinkedInons, Youtubons, Googleplusons…
sommes-nous bien certains qu’à ce rythme effréné cette manière de vivre et
communiquer satisfasse l’humain qui est encore en nous ? Alors, si
lassitude vous en prends ce dont je ne doute point, pensez à votre grand-mère,
qui a surement des talents de Community Manager ; quelques valeurs en plus !
mais pensez-y plutôt tôt que tard… « mortels » obligent.
Jubilatoire!
RépondreSupprimerExpérience vécue pour moi sans la grand'mère hélas et toutes ses discrètes et efficaces qualités.
Tu penses à quelqu'un en particulier?
Il faut bien lire dans cette analyse pleine de finesse que "la planète virtuelle se cogne encore au réel" et que les parasites ne sont pas toujours ceux que l'on croit!
Ah Liliane, comme je savais que ce petit papier te ravirait... notre petite vengeance bien avouable envers des gens trop beaux parleurs pour avoir pris le temps de se souvenir de leurs paroles et de leurs prétendues engagements. Et il y en a malheureusement bien trop, de ces gens là. Vigilance, vigilance :-))
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